Jovenel Moïse hisse les voiles de l’indifférence face à un énième naufrage…

Published On avril 2, 2019 | By Samanta Bellange | Uncategorized

Ni un mot ni un tweet. Le président Jovenel Moïse, jusqu’à lundi midi, a hissé les voiles du silence, de  l’indifférence après la mort de 15 Haïtiens dont l’embarcation a chaviré au large de Turks And Caicos. En l’espace d’un peu plus d’un mois, ce sont en tout 43 compatriotes qui ont péri en mer en fuyant la misère, aggravée par la défaillance de la gouvernance et le bilan économique et financier désastreux de l’homme de la banane…

Quinze compatriotes ont péri en mer au large des îles Turks and Caicos. «Leur navire a coulé dans un endroit infesté de requins», a rapporté le Miami Herald, dimanche 31 mars 2019. Quatorze survivants ont pu être secourus. Lundi matin, la nouvelle a fait la une de plusieurs matinales, mais le président Jovenel Moïse, occupé à des discussions politiques pour former un nouveau gouvernement, ne s’est pas donné la peine de faire le moindre tweet. Il n’y a pas un mot de sympathie de la présidence, encore moins une note pour décourager les aventures périlleuses en haute mer à bord de frêles esquifs.

L’indifférence du président interpelle autant que le rapprochement de l’intervalle de ces drames survenus en mer. En février dernier, il y a tout juste un mois, les autorités bahamiennes  avaient récupéré les cadavres de 28 Haïtiens après le naufrage de leur embarcation. Il y avait aussi des rescapés. Beaucoup de candidats à l’exode vers des cieux plus cléments savent qu’ils peuvent mourir. Pour eux, il vaut mieux mourir en essayant de trouver une vie meilleure que de traîner sa carcasse en Haïti où les horizons sont bouchés.

L’intervalle rapproché de ces voyages clandestins, de ces drames, intervient dans un contexte d’aggravation de la situation socio-économique du pays. L’inflation  a atteint 17 % en février et la sécheresse du début d’année a pesé sur des populations déjà en insécurité alimentaire. Le président Moïse, apparemment intéressé à l’application de mesures pour réduire la cherté de la vie, est passé à autre chose après la pression de l’opération « Peyi lòk ». Son agenda se décline entre rendez-vous avec le CEP sur les élections, rencontres sur la formation d’un nouveau gouvernement après la censure de Jean-Henry Céant qui a baissé pavillon avant de faire baisser le prix du riz. Le président Moïse, fort de l’appui de Donald Trump, s’est peu inquiété d’une opposition en opposition avec elle-même et en panne de propositions, de crédibilité pour rassembler au-delà de ses bases. Le président Moïse, qui engrange les « victoires politiques », n’a pas fait ce qu’il faut pour qu’il y ait au plus vite un nouveau gouvernement, un nouveau budget pour pouvoir obtenir les 45 millions promis cette année par le FMI.

Cette administration, sensible aux demandes du secteur textile, n’a pas encouragé la SONAPI à faire le nécessaire pour  être éligible au décaissement d’un don de 41 millions fait par la BID en 2015 pour financer l’expansion du parc industriel de Caracol. Sans autre forme de procès, le vote, à la Chambre des députés de modification de la loi sur le salaire minimum a fini par pousser la compagnie coréenne SEA-A , qui a déjà créé 13 000 emplois à Caracol, à arrêter son plan  pour y créer 7 000 emplois supplémentaires. Les emplois directs génèrent des emplois indirects. La modification de cette loi par la majorité supportant le président Moïse n’est pas sans conséquence. Avoir plus de 80 millions de dollars américains non décaissés dans les pipelines du FMI et de la BID est l’illustration d’une défaillance au niveau de la gouvernance d’Haïti, un État pauvre qui n’a toujours pas pu récupérer les 42 millions de dollars avancés en 2016 dans le cadre d’un prêt non concessionnel contracté d’une banque chinoise pour la réhabilitation de l’aéroport Toussaint Louverture. Les hommes proches du président Moïse ont d’abord fait de la politique avec ce dossier dans l’espoir d’embarrasser deux ex-ministres de l’administration Privert avant que des correspondances ne prouvent que les demandes de renégociation du contrat par cette firme chinoise n’ont pas été connues du grand public.

Comme d’autres présidents avant lui, Jovenel Moïse, après avoir promis argent et nourriture au peuple, n’accorde pas toute l’attention nécessaire aux actions en faveur de la réduction de la pauvreté. Après avoir bourlingué dans tout le pays dans la Caravane du changement, le président, avec un passif économique et financier désastreux, est devant l’évidence de l’aggravation de la situation socio-économique du pays. Les prix des produits de première nécessité sont inabordables pour beaucoup de bourses. L’option, pour certains, quand le pays va si mal, est de partir en sachant que la mort peut être sur la route de l’exode.

 

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